Diagnostic Pré-Implantatoire : vote négatif de la CDU

Lors du congrès de la CDU à Karlsruhe, du 14 au 16 novembre 2010, le parti s’est prononcé pour l’interdiction du Diagnostic Pré-Implantatoire (DPI). Le DPI est actuellement interdit en Allemagne.

 

Le DPI est une technique consistant à tester des facteurs génétiques chez un embryon créé par fécondation in-vitro. Si l’embryon est sain, il est implanté dans l’utérus de la future mère. Les embryons malades sont détruits. Cette stratégie est déjà utilisée dans de nombreux pays pour les parents présentant des risques d’avoir un enfant atteint d’une maladie génétique incurable.

 

La cour fédérale de justice avait décidé en juin dernier que le DPI n’était pas passible de peine, pour les personnes ayant un risque élevé de donner naissance à des enfants lourdement handicapés. Cette décision avait été très controversée, et la Ministre fédérale de la recherche et de l’enseignement, Annette Schavan, avait demandé une prise de position du Conseil d’éthique à ce sujet. Un groupe de travail de ce conseil devrait donner réponse à cette requête d’ici l’été 2011. Le Conseil national de l’ordre des médecins a déjà donné un avis négatif. Le FDP s’est quant à lui prononcé pour une autorisation du DPI, en association avec des règles strictes, limitant son utilisation. L’avis de la CDU sur ce sujet controversé était très attendu. Le débat organisé lors du congrès de Karlsruhe a duré 3h30 et les avis au sein du parti restent très partagés : 49% des votants aimeraient l’autoriser dans le cadre de lois rigoureuses. Angela Merkel s’est prononcée contre le DPI en déclarant qu’il est pratiquement impossible de le limiter aux cas où le contexte génétique des parents peut entraîner un fort handicap de leur futur enfant.

Les arguments du débat ont été variés. De nombreux orateurs ont rappelé que la chrétienté était une valeur forte de la CDU et que, selon eux, la vie commence bien avant la naissance. Les pro-DPI ont déclaré que celui-ci pourrait aider à éviter les interruptions volontaires de grossesse, nombreuses en Allemagne. L’avortement thérapeutique est en effet encore possible jusqu’au neuvième mois de la grossesse. Dans ce contexte, ils ne comprennent pas pourquoi le DPI, plus préventif, serait interdit. Peter Hintze, Secrétaire d’Etat du ministère de l’économie, à la tête des pro-DPI, a déclaré que le DPI pourrait être une alternative plus humaine au diagnostic prénatal. Il a rappelé que les parents ayant des risques élevés connus d’avoir un enfant atteint d’une maladie génétique grave et incurable, devaient actuellement attendre un stade avancé de la grossesse avant de connaître l’état de santé de leur enfant, et, dans certains cas, d’envisager un avortement. Un certain nombre d’entre eux va déjà chercher des solutions à l’étranger.

 

Une raison de refuser le DPI est la peur que les médecins, dans le futur, puissent décider quelle vie serait digne d’être vécue et quelle vie ne le serait pas. De plus, lorsque la brèche sera ouverte, la pression d’avoir un enfant « parfait » pourrait augmenter. La Ministre fédérale de la Famille, Mme Schröder, nie le danger de la sélection des embryons et de la conception de bébés « désignés » si la loi définit précisément les cas concernés par le DPI.

Le Président du Bundestag, M. Lammert, a proposé un compromis : garder l’interdiction du DPI mais ne pas poursuivre en justice son utilisation. Mais les responsables du vote ont réclamé un choix tranché. Le délégué au handicap, M. Hüppe, a voulu démontrer que le DPI était une vaine promesse en citant les chiffres de la société européenne de reproduction humaine et d’embryologie (ESHRE) : l’année dernière, 119.711 embryons on été testés, 21.478 d’entre eux ont été jugés aptes et transplantés, 3.158 ont donné lieu à une grossesse et 2.287 à une naissance, dont 99 cas où l’enfant était malgré tout gravement handicapé.

 

Le Bundestag devrait rendre publique sa décision au début de l’année prochaine. Celle-ci aboutira à la création d’une nouvelle loi. La CDU a décidé de ne donner aucune consigne de vote à ses élus et de les laisser choisir en connaissance de cause. De la part du SPD et du FPD, une majorité d’élus devrait se prononcer pour le DPI. Un moratoire de deux ans à ce sujet est de plus en plus souhaité. La population semble cependant globalement assez encline à autoriser le DPI : selon une enquête de l’Emnid [1], 62% des allemands y seraient favorable, et 34% seulement aimeraient l’interdire.

 

 

[1] : La TNS Emnid GmbH & Co. KG, ou simplement Emnid, est le plus gros institut de sondage d’Allemagne.

 

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Rédacteur :

Claire Cécillon, claire.cecillon@diplomatie.gouv.frhttps://www.science-allemagne.fr/