Transition énergétique : un « projet commun pour l’avenir », le rapport final de la Commission d’éthique est paru le 30 mai 2011

La Commission d’éthique sur la sécurité de l’approvisionnement énergétique mandatée suite aux évènements de Fukushima par la chancelière Angela Merkel [1] a rendu son rapport final ce lundi 30 mai. Elle a été suivie d’une déclaration gouvernementale annonçant la sortie du nucléaire pour 2022 et la prise en compte des recommandations de la Commission d’éthique comme « ligne directrice ». Seules trois centrales pourront rester en service jusqu’en 2022: Neckarwestheim 2 (construite en 1989), Isar 2 (1988) et Emsland (1988), six d’ici 2021 et huit (les sept du moratoire plus Krümmel-1984) arrêtées en 2011 ne seront pas remises en service. « C’est un grand défis mais aussi une grande chance pour l’Allemagne » a déclaré la chancelière. La Commission d’éthique ne préconise pas seulement une sortie du nucléaire d’ici dix ans mais émet également dans son rapport de 48 pages de nombreuses recommandations pour l’organisation de la sortie du nucléaire.

 

 

En ce qui concerne la recherche, la Commission d’éthique préconise une « offensive de formations », voyant dans le « projet commun » une chance de créer de nouveaux emplois et donc de nouveaux besoins de formation notamment dans les domaines des énergies renouvelables, de la gestion des réseaux et de l’augmentation de l’efficacité énergétique. Cette dernière devrait être un thème majeur de la recherche [2] et concernera aussi bien l’efficacité de l’énergie électrique, que thermique, mécanique et chimique.

Une partie des ressources financières disponibles devraient être allouées à des domaines de recherche qui sont actuellement « mineurs ». Les perspectives européennes et internationales devraient aussi être intégrées tout comme les dimensions locales, pour accompagner la recherche sur le thème de la décentralisation de la production. La recherche doit examiner « toutes les options » de solutions énergétiques décarbonées, notamment de capture et de stockage du CO2 [3].

 

Enfin, la Commission d’éthique recommande que la recherche dans les domaines nucléaires ne soit pas abandonnée. La recherche sur la sûreté nucléaire et le traitement de la radioactivité doivent continuer. La recherche sur la fusion doit être vue comme « un devoir international, avec le potentiel de contribuer grandement à l’approvisionnement énergétique ».

 

La recherche en sciences humaines sera également importante dans la transition énergétique afin notamment d’établir tous les instruments économiques, juridiques et politiques nécessaires à sa réalisation. Selon la Commission d’éthique la recherche sur l’acceptance aura un rôle « centrale ».

 

 

En ce qui concerne l’impact de la transition énergétique sur les relations internationales de l’Allemagne, la Commission d’éthique y a consacré un chapitre entier intitulé « la dimension internationale du Made in Germany ». Que ce soit pour la protection du climat ou pour les technologies de charbon propre, l’Allemagne devrait prendre la main sur la recherche internationale et « faire rayonner son expérience d’un choix énergétique différent ».

Quant à la sécurité nucléaire des autres pays, « l’Allemagne ne devrait ni s’isoler ni se laisser imposer des décisions pro-nucléaires ». « Suite à la catastrophe de Fukushima il est grand temps d’européaniser et d’internationaliser la réglementation sur la sûreté nucléaire ». Aussi la Commission suggère-t-elle « l’ajustement » du travail de l’Agence Internationale de l’Energie Atomique (IAEA) et le « suivi » de la transposition en droit national de la directive 2009/71/EURATOM [4]. La Commission rappelle à ce titre que depuis dix ans déjà la Cour de Justice de l’Union Européenne a signalé la responsabilité de l’Union Européenne en termes de sécurité nucléaire qui ne figure pas dans le traité EURATOM, quasiment inchangé depuis 1957. Pour elle, la sûreté nucléaire doit devenir « une composante de la politique européenne ».

Pour la Commission d’éthique, « il est aussi fondamental que les critères formulés par la Commission de sécurité des réacteurs nucléaires [2] soient pris en compte dans les critères européens d’évaluation des centrales pour s’assurer qu’aucune centrale d’un autre Etat européen ne soit encore en service (et veuille, le cas échéant, exporter son énergie nucléaire vers l’Allemagne) alors même qu’elle ne satisfasse pas les critères de la Commission de sécurité et bien qu’elle ait réussi les stress-tests européens ».

 

 

En ce qui concerne le suivi de la transition énergétique la Commission a proposé de créer deux « institutions »: un mandataire parlementaire chargé du contrôle et du suivi des programmes énergétiques mis en place et un « Forum National de la Transition Energétique » devant permettre la continuité du débat public en toute transparence. Pour la Commission d’éthique, la transparence et l’acceptance sont les conditions pour réussir une sortie complète du nucléaire.

 

 

L’agence fédérale des réseaux (Bundesnetzagentur) a elle aussi rendu son rapport vendredi dans lequel est précisé « qu’en l’état actuel des choses, l’agence ne saurait garantir pour toutes les journées d’hiver que les réserves énergétiques soient suffisantes, notamment pour le sud de l’Allemagne ». Selon la déclaration du gouvernement, si une telle situation devait se produire, et « si aucune autre possibilité ne pouvait être envisagée », il remettrait en service une centrale arrêtée.

La détermination de ces centrales dites de « réserve froide » n’est pas clarifiée. Selon différentes sources il pourrait y en avoir une parmi les sept plus anciennes ou plusieurs. En tout état de cause, cette procédure de secours devra être soumise à autorisation et décision de l’Agence des réseaux et ne devrait être possible que pour les deux prochains hivers. « Ce n’est pas un échappatoire » a précisé la chancelière.

 

 

La prise en compte des recommandations contenues dans les trois rapports publiés à deux semaines de l’échéance du moratoire ne sera précisée que dans les textes de loi qui devraient être adoptés début juillet.

 

 

 

[3] Parallèlement le gouvernement a décidé de construire de nouvelles centrales à charbon.

 

[4] La transposition en droit national de la directive 2009/71/EURATOM doit être effectuée par tous les Etats membres de l’Union Européenne au plus tard le 22 juin 2011.

 

 

 

 

 

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Rédacteur :

Edith Chezel, edith.chezel@diplomatie.gouv.frhttps://www.science-allemagne.fr/