[Focus] Compte-rendu du CeBIT 2015 (16-20 mars)

Le CeBIT est l’un des principaux salons au monde dans le secteur des nouvelles technologies. Chaque année, il réunit plus de 3.300 exposants et 220.000 visiteurs au mois de mars à Hanovre (Basse-Saxe). Traditionnellement, le salon met à l’honneur un pays partenaire. Après le Royaume-Uni en 2014, c’est la Chine qui a été invitée cette année. Près de 600 entreprises high-tech chinoises étaient ainsi représentées, et le salon a été inauguré par le vice-Premier ministre chinois Ma Kai et la Chancelière allemande Angela Merkel. Parmi les intervenants vedettes du salon, on trouve également le fondateur du groupe chinois de commerce en ligne Alibaba, Jack Ma.

La thématique principale de cette édition était la « d!conomy » (« digital economy », économie numérique). Les enjeux entourant cette question, et plus généralement l’avenir des nouvelles technologies, ont été discutés lors des nombreuses conférences organisées en marge du salon (CeBIT Global Conferences).

 

1- Une présence institutionnelle et académique importante

 

Outre les principales entreprises du secteur, une forte présence institutionnelle est à signaler. La plupart des Lander étaient représentés sur le salon, afin de faire la promotion des universités et centres de recherche de leurs territoires. Plusieurs agences gouvernementales (Imprimerie fédérale, Office fédéral pour la sécurité des TIC…), ainsi que les trois Ministères fédéraux concernés étaient également présents, pour présenter l’action du gouvernement fédéral sur le numérique :

 

– Ministère fédéral de l’économie et de l’énergie – BMWi

Le BMWi disposait d’un important stand dans le hall « Recherche et Innovation », organisé en trois espaces présentant les différents programmes de soutien du Ministère :
– une zone dédiée aux start-ups et jeunes entreprises innovantes (programmes eXist, IKT Innovativ et incubateur German Accelerator),
– un espace consacré à la numérisation des PME (programme Mittelstand Digital),
– une zone présentant les premiers résultats du programme Smart Service Welt, qui vise à développer une gamme de services en ligne pour les entreprises allemandes. De nombreuses applications pour l’industrie 4.0 y étaient exposées : production automatisée et individualisée de chaussures et textiles, optimisation de la production grâce au Big Data, amélioration de l’efficacité énergétique par les réseaux intelligents.
Plusieurs conférences sur l’action du BMWi dans le numérique étaient également organisées, notamment en présence de la Secrétaire d’Etat parlementaire Brigitte Zypries.

 

– Ministère fédéral des transports et de l’infrastructure numérique – BMVI

Le BMVI faisait la promotion de son action pour la mise en place d’une infrastructure numérique de qualité (>50Mbit/s) sur tout le territoire allemand à l’horizon 2018. Il a notamment présenté son nouvel outil, l’ « Atlas du haut débit » (Breitbandatlas), un site internet qui permet à tout citoyen de consulter l’avancée de ce déploiement en temps réel, via des cartes détaillées.

 

– Ministère fédéral de l’enseignement et de la recherche – BMBF

Egalement installé dans le hall dédié à la recherche et à l’innovation, le stand du BMBF présentait différents projets et dispositifs de soutien à la recherche, en lien avec la Nouvelle Stratégie High-Tech [1] du gouvernement fédéral. Deux thématiques étaient mises en avant : la cybersécurité et les systèmes de mobilité et de transport intelligents. Une partie du stand accueillait également les jeunes chercheurs (de moins de 21 ans) impliqués dans le programme Jugend Forscht. Les lauréats du « CeBIT Innovation Award », prix créé il y a trois ans par le BMBF et les organisateurs du salon pour récompenser les découvertes les plus prometteuses dans le domaine de la haute technologie, étaient également présents pour présenter leurs inventions. Le premier prix (doté de 50.000 euros) a été décerné à l’application FOVEA, développée par une startup fondée par d’anciens étudiants de l’Université de sciences appliquées de Hildesheim/Göttingen (HAWK). Elle s’adresse à l’industrie du bois (simplifier les procédures de mesure et de comptage des rondins à l’aide d’un smartphone).

 

Parmi les centres de recherche présents, la Société Fraunhofer disposait d’un stand important. Il présentait les activités de ses huit instituts actifs sur les thématiques de la cybersécurité, du Big Data/Smart Data, de l’environnement et de l’industrie 4.0. A l’occasion de l’ouverture du salon, une conférence de presse a été organisée en présence de la Ministre fédérale de l’enseignement et de la recherche, Johanna Wanka. Elle portait sur le projet de création de l’ « Industrial Data Space », un centre de données pour PME leur facilitant l’accès à l’industrie 4.0 [2].

 

2- CeBIT Global Conferences

 

Le CeBIT Global Conferences réunit des personnalités politiques et du monde de l’entreprise de haut rang, pour discuter des enjeux actuels de l’industrie numérique. Les thématiques de travail cette année portaient sur la « d!conomy », la mobilité, l’internet des objets et la cybersécurité.

 

Parmi les intervenants, Dave Goldberg, PDG de la société leader des sondages en ligne Surveymonkey, a évoqué les difficultés rencontrées actuellement par les mégadonnées (Big Data). Il remarque que les résultats actuels ne sont pas à la hauteur des espoirs suscités par l’émergence de cette technologie il y a quelques années. L’une des raisons tient selon lui dans la nature même des données collectées.

 

Il a établi une différence entre les données « implicites » (transmises de manière non volontaire, lorsque l’on surfe sur internet, utilise un moteur de recherche, ou effectue un achat en ligne) et les données « explicites », que les internautes partagent de leur plein gré. Selon lui, la déception vis-à-vis du Big Data vient du fait que les entreprises s’appuieraient trop, à tort, sur les données implicites. Il cite pour cela l’exemple des publicités ciblées, suggestions de shopping ou de musique en ligne erronées, car basées sur des données trop nombreuses et non affinées. Il faut donc selon lui opérer un saut qualitatif, et opter pour les données explicites. Cela passe par le fait de poser des questions personnalisées aux internautes, afin de collecter les meilleures données possibles. Il estime qu’il faut donc sortir de la logique du Big Data qui visait à accumuler toujours plus de données, pour privilégier la qualité de ces dernières.

 

Le Commissaire européen en charge de l’économie numérique, Günther Oettinger, était également présent. Il a évoqué l’action de la Commission européenne pour faire émerger un marché intérieur du numérique, et lutter contre la fragmentation actuelle entre les 28 Etats membres. A cet égard, il a rappelé les moyens alloués pour la recherche et l’innovation, notamment via le plan d’investissement. Le plan Juncker devrait également financer des projets d’amélioration des infrastructures numériques dans plusieurs pays européens dont l’Allemagne. Il a par ailleurs évoqué les réalisations dans le domaine des télécoms (paquet télécom, tarifs en itinérance…).

 

3- La présence française sur le CeBIT

 

Une vingtaine d’exposants français étaient présents sur le salon. Parmi eux, six jeunes entreprises labellisées « French Tech » présentaient leurs activités dans le hall réservé aux start-ups. Trois autres figuraient parmi les lauréats de l’initiative « CODE_n » (voir ci-dessous).

 

4- Espace « CODE_n – Vers l’internet des objets »

 

Depuis 2012, une cinquante de start-ups internationales sont sélectionnées dans le cadre du projet « CODE_n ». L’objectif de ce concours est de valoriser les jeunes entreprises les plus innovantes, en leur offrant une visibilité forte tout au long du salon. Elles peuvent ainsi présenter leurs projets et concepts de développement commercial aux partenaires, investisseurs et clients potentiels.

 

Chaque année, le concours « CODE_n » est axé autour d’une thématique. Après le Big Data l’an dernier, c’est l’internet des objets qui était à l’honneur pour cette édition. Sur les 400 start-ups ayant postulé, cinquante, issues de 17 pays, ont été retenues. Les thématiques traitées tournaient autour des services médicaux personnalisés et de la maison connectée (connexion des appareils électriques et gestion à distance des appareils, clés dématérialisées…).

 

Un jury, composé d’entrepreneurs et de professionnels du numérique, récompense le meilleur projet, en élisant le lauréat du « CODE_n Award ». Pour cette édition, c’est l’entreprise « relayr » basée à Berlin, qui a remporté ce prix, doté de 30.000 euros. Elle a notamment développé un produit, la « WunderBar », se présentant sous la forme d’une barre de chocolat truffée de capteurs (de température, d’humidité, de mouvement…). Les divers éléments sont détachables, et peuvent être installés sur des objets de la vie courante, les transformant ainsi en objets connectés. Les développeurs peuvent ensuite créer des applications pour smartphone utilisant les données recueillies. Ces données peuvent également être mises en commun sur une plateforme cloud.

 

Pour en savoir plus, contacts :

 

– [1] Depuis 2006, la Stratégie High-Tech définit les grandes lignes de la politique de recherche et d’innovation en Allemagne. Pour plus d’informations sur sa dernière édition, consulter le BE Allemagne 672 « Nouvelle Stratégie High-Tech du gouvernement fédéral allemand » – 11/09/2014 – http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/76676.htm


– [2] Le projet d’Industrial Data Space avait fait l’objet d’un article dans le BE Allemagne 692 « Création d’un centre de données pour les PME en Allemagne » – 27/02/2015 – http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/78007.htm
– Site internet du CeBIT : http://www.cebit.de/home
– « Atlas du haut débit », sur le site internet du BMVI : http://www.zukunft-breitband.de/
– Site internet de la start-up « FOVEA » (1er prix du CeBIT Innovation Award) : http://www.fovea.eu/
– Site internet de la start-up « relayr » (lauréate du CODE_n Award) : https://relayr.io/

 

Sources :

Participation du rédacteur au CeBIT 2015, le 16/03/2015

 

Rédacteur :

Kenny Abbey, kenny.abbey@diplomatie.gouv.fr – https://www.science-allemagne.fr

 

Origine : BE Allemagne numéro 697 (1/04/2015) – Ambassade de France en Allemagne / ADIT – http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/78248.htm