Retour sur la conférence « Cybersecurity : is european governance possible ? » le 7.11.2018 à l’Ambassade de France à Berlin

Intervenant.e.s :

  • Julia SCHUETZE, membre du Think Tank Stiftung Neue Verantwortung pour les questions relatives au forum transatlantique, modératrice
  • Théodore CHRISTAKIS, professeur de Droit International Public à l’Université de Grenoble-Alpes et directeur adjoint du Grenobles-Alpes Data Institute
  • Christian DAVIOT, conseiller stratégique à l’Agence Nationale de Sécurité des Systèmes Informatiques (ANSSI)
  • Isabel SKIERKA, analyste à l’Institut pour la Société Numérique (ESMT Berlin) et boursière non-résidente auprès du Global Public Policy Institute
  • Saskia ESKEN, députée SPD au Bundestag et porte-parole du SPD sur la politique numérique

La table-ronde a tenté d’apporter des réponses aux deux questions suivantes :
1) Comment l’Union européenne devrait-elle faire face à la menace croissante des cyberattaques ?
2) Comment organiser efficacement une politique de cybersécurité cohérente à l’échelle européenne ?
La cybersécurité n’est plus considérée sous le seul angle technique, mais est bien devenue une question politique ; ainsi, la société civile doit se mobiliser pour porter sa voix dans le débat public.

Théodore CHRISTAKIS (FR)
a d’abord souligné la nécessité d’un dialogue franco-allemand pour promouvoir un comportement responsable des Etats. Il a souligné que les deux pays ont déjà un terrain d’entente sur de nombreuses questions – comme l’adoption d’une boîte à outils de cyber-diplomatie – mais qu’ils doivent s’engager davantage pour faire avancer une approche européenne de la protection des systèmes d’information auprès de l’Organisation des Nations Unies (ONU).

Selon Isabel SKIERKA (DE), il existe en réalité déjà un système de gouvernance de la cybersécurité. L’Union Européenne aurait déjà pris des mesures importantes afin de protéger les infrastructures critiques, de réguler davantage le marché numérique unique (digital single market) et de lutter contre la cybercriminalité. Elle a notamment souligné qu’il existe un grand besoin d’échange d’informations, non seulement entre les Etats Membres mais aussi entre le secteur privé et le secteur public.

Saskia ESKEN (DE)
s’est dite préoccupée par le fait que certains États ne tirent pas les conséquences de la hausse de la cybercriminalité et des cyberattaques avec un investissement renforcé dans la recherche et le développement en cybersécurité. Les différents acteurs internationaux manquent également de définitions communes pour qualifier les cyberarmes (cyberweapons) ainsi que les cyberattaques : de telles définitions communes seraient un premier pas vers une politique de cyberdésarmement à l’échelle mondiale.

Enfin, pour Christian DAVIOT (FR), les compétences techniques en matière de cybersécurité manquent au niveau européen ; elles se situeraient en réalité au sein des Etats-Membres, exception faite de l’Agence européenne pour la sécurité du réseau et de l’information (ENISA). C’est pourquoi la Commission européenne a un réel besoin de s’appuyer sur l’expertise française et allemande. Nos deux pays auraient des vues similaires leur permettant de prendre l’initiative à l’échelle européenne. Il faudrait également communiquer ouvertement les raisons pour lesquelles nous aurions besoin d’une politique ambitieuse de cybersécurité : afin de préserver la paix.

Une discussion animée a suivi ces déclarations liminaires. Les intervenant.e.s ont ainsi convenu de l’importance d’une approche multi-acteurs, car les défis à relever ne peuvent l’être au seul niveau national. Les expert.e.s croient fermement en la possibilité d’une gouvernance européenne en matière de cybersécurité, en particulier sur la base de coopérations existantes entre les États-Membres. En revanche, la coopération transatlantique et le dialogue avec les Etats-Unis semblent actuellement plus difficiles. Ces circonstances rendent nécessaire la mise en place d’une politique européenne commune : une approche européenne en matière de gouvernance, menée par la France et l’Allemagne, pourrait conduire à une nouvelle impulsion en faveur d’une résolution générale au niveau de l’ONU.

Tout au long de l’événement, la modératrice Julia SCHUETZE a invité la centaine de personnes présentes à participer au débat. La diversité des profils représentés dans l’auditoire, entre étudiants, jeunes professionnels, et représentants du secteur public et privé, a permis de soulever de nombreuses questions ainsi que d’animer la discussion. En outre, les échanges sont allés bon train pendant le cocktail qui a suivi la table-ronde, faisant ainsi de cet événement un succès.

Source : Communiqué de presse du Das Progressive Zentrum, « EU Digital Challenges #2 : French-German Debate on Cybersecurity » 7.11.2018
http://www.progressives-zentrum.org/eu-digital-challenges-cybersecurity/

Rédactrice : Philippine Régniez, philippine.regniez[at]diplomatie.gouv.fr – www.science-allemagne.fr

Photo : (c) EuropaNova