La composition du manteau terrestre mieux connue grâce à la détermination des propriétés d’élasticité sous haute pression de la bridgmanite

La Terre est composée de différentes enveloppes terrestres d’épaisseurs variables avec, en partant de la surface, la croûte, le manteau et le noyau. La délimitation entre ces enveloppes est due à une variation de leur composition chimique qui ne peut être déterminée à partir d’expériences in-situ, car les températures et les pressions atteintes sont très élevées. Pour cela, les scientifiques se basent sur le modèle PREM (Preliminary Reference Earth Model) qui, à partir de mesures de propagation d’ondes sous la surface terrestre et de mesures en laboratoire des propriétés physico-chimiques (élasticité notamment) des minéraux, permettent de déduire la composition minéralogique des différentes enveloppes.

Dans le cas de la bridgmanite, ses propriétés d’élasticité étaient encore mal connues dans des conditions de pression compatibles avec sa présence dans le manteau inférieur entre 700 et 2900 km de profondeur. L’équipe de géologues de l’Université de Bayreuth, grâce à son expertise basée sur l’utilisation combinée de la diffusion Brillouin [2] et la diffraction des rayons X [3] a réussi à déterminer les propriétés d’élasticité de ce minéral jusqu’à une profondeur de 1200 km.

Ils en ont alors déduit, en utilisant le modèle PREM et diverses données et hypothèses, que le manteau inférieur entre 700 et 1200 km de profondeur était composé à 75% de bridgmanite, à 18% de périclase ferreuse et à 7% de pérovskite calcosilicatée. Cette composition minéralogique est comparable à celle trouvée pour le manteau supérieur entre 70 et 700 km de profondeur. Cette similitude a pu être montrée dans cette étude car les chercheurs ont pris en compte la teneur en bridgmanites alumineuse et ferreuse ainsi que le taux d’oxydation du fer. Plus précisément, jusqu’à 1200 km de profondeur, le fer est présent majoritairement dans la bridgmanite sous forme Fe3+ alors qu’au-delà il semblerait que la forme Fe2+ soit plus présente. Ceci a certainement une influence sur les propriétés physico-chimiques du minéral et in fine sur les processus se déroulant dans le manteau inférieur.

[1] La bridgmanite est une pérovskite silicatée nommée en hommage à Percy Wiliams Bridgman (1882-1961), physicien américain et prix Nobel de physique en 1946.

[2] La diffusion Brillouin est une technique de diffusion inélastique de la lumière permettant d’évaluer des paramètres tels que les constantes élastiques d’un matériau, ou ses caractéristiques magnétiques (par ex. aimantation).

[3] La diffraction des rayons X est une technique d’analyse renseignant sur la géométrie (dimension, orientation) d’un réseau cristallin. Ceci permet d’en déduire la formule chimique de l’élément analysé, la présence de liaisons chimiques, etc.

Publication : A. Kurnosov, H. Marquardt, D. J. Frost, T. Boffa Ballaran & L. Ziberna,
ꞌꞌEvidence for a Fe³⁺-rich pyrolitic lower mantle from (Al,Fe)-bearing bridgmanite elasticity dataꞌꞌ, Nature, 2017, doi:10.1038/nature21390

Source : « Unter hohem Druck elastisch : Bayreuther Forscher erschließen Zusammensetzung des Erdmantels », communiqué de l’Université de Bayreuth, 29/03/2017 – https://www.uni-bayreuth.de/de/universitaet/presse/pressemitteilungen/2017/032-erdmantel/index.html

Rédacteur : Luc Massat, luc.massat[at]diplomatie.gouv.fr – www.science-allemagne.fr