L’Allemagne de plus en plus attractive pour ses chercheurs

Le Réseau international des académiques allemands (German Academic International Network – GAIN) est une initiative commune à la Fondation Alexander von Humboldt [1], l’Office allemand des échanges académiques (DAAD) et la Communauté allemande des moyens pour la recherche (DFG). Les partenaires de GAIN comprennent la Société Fraunhofer, la Communauté Helmholtz, la Société Max Planck, la Communauté Leibniz, la Conférence allemande des présidents d’universités (Hochschulrektorenkonferenz – HRK), et l’Aide allemande contre le cancer. C’est le plus grand réseau de chercheurs allemands en Amérique du Nord, avec plus de 4.500 adhérents. Il leur permet de maintenir contact avec le paysage allemand de la recherche.

 
Au moyen de bourses et de financements de participation à des entretiens d’embauche et des conférences, GAIN vise ainsi à faciliter le retour en Allemagne des chercheurs, et participer à la reconquête de personnel qualifié. Le réseau a également pour objectif de promouvoir les coopérations scientifiques entre chercheurs allemands et américains. Il organise notamment des conférences annuelles, accompagnés de forums de l’emploi. Lors de la douzième édition de cette conférence, qui a eu lieu début septembre 2012 à Boston, plus de 250 jeunes chercheurs allemands ont pu rencontrer plus de 100 représentants des milieux scientifique, économique et politique allemands et se renseigner sur les possibilités de carrière et les avantages de l’Allemagne comme lieu de recherche. Le forum de l’emploi réunissait de nombreux établissements d’enseignement supérieur, organismes de recherche et entreprises allemands, venus recruter ces jeunes scientifiques au profil international.

 
A l’instigation du Ministère fédéral de l’enseignement et de la recherche (BMBF), qui soutient financièrement GAIN depuis près de dix ans, les offres et les services du réseau GAIN viennent de faire l’objet d’une évaluation. Tous les participants aux événements de GAIN entre 2004 et 2011 ont été sondés, ce qui représente 1.665 personnes au total, principalement dans les sciences exactes et la médecine, dont près de la moitié ont répondu au questionnaire. Il est estimé que 6.000 à 7.000 jeunes chercheurs allemands effectuent actuellement des recherches aux Etats-Unis. Le Secrétaire d’Etat parlementaire auprès du BMBF, Helge Braun, s’est félicité des résultats de l’étude : « Notre politique, qui consiste à inciter les jeunes chercheurs à étudier et effectuer des recherches à l’étranger, est bénéfique pour les deux côtés. Le pays hôte profite des idées de jeunes Allemands, mais la plupart reviennent ensuite dans leur patrie et participent à la capacité d’innovation de l’Allemagne ».

 
La situation économique des Etats-Unis est clairement un facteur important dans les décisions de retour. « L’Allemagne, qui a ces derniers temps investi massivement dans la recherche, n’en est que plus attractive », explique le biologiste Baris Tursun, qui, après un post-doctorat à l’Université Columbia à New York, a pris la tête d’un groupe de jeunes chercheurs au Centre Max Delbrück de Berlin. Dans son laboratoire américain se trouvaient 13 jeunes chercheurs, pas un n’était américain. Plusieurs d’entre eux lui ont posé des questions sur les possibilités d’emploi en Allemagne. Même les chercheurs non-allemands commencent à s’intéresser au pays, bien que le manque de postes de long terme et la non connaissance de la langue soient les deux points qui freinent leur venue.

 
Les principaux résultats de l’étude :

 
– Retour en Allemagne
Plus des deux tiers des chercheurs qui ont participé aux événements de GAIN entre 2004 et 2009 sont depuis revenus en Allemagne. Moins de 30% sont encore en Amérique du Nord, et parmi ceux-ci, nombreux sont les chercheurs qui ne prévoient pas d’y rester longtemps. Parmi les participants aux événements de 2010, 48,4% sont de retour, et parmi les participants 2011, 12,9% (le questionnaire a été mené de janvier à mars 2012), car la majorité des sondés n’avaient pas encore fini leur post-doc nord-américain. L’objectif ultime de GAIN est néanmoins d’obtenir un taux de retour de 95%, « car il est comparablement plus dur d’attirer chez nous des chercheurs étrangers », explique Helge Braun.

 
– Emploi
La comparaison directe montre que les chercheurs ont une meilleure chance d’obtenir un poste durable en Allemagne qu’aux Etats-Unis. Cela contredit le mythe que tous ceux qui restent aux Etats-Unis peuvent obtenir une place en « tenure track ». 12,5% des chercheurs revenus avaient obtenu un poste de professeur W2 ou W3 (poste de professeur senior, équivalent aux postes à durée indéterminée aux Etats-Unis), 10,7% avaient un poste de professeur junior, environ 28% dirigeaient un groupe de jeunes chercheurs, 24% travaillaient comme post-doctorants ou collaborateurs scientifiques, et 14% étaient actifs dans l’industrie (souvent à des postes de recherche et développement). Seuls 1,7% n’avaient pas d’activité professionnelle. En revanche, parmi les chercheurs restés en Amérique du Nord, seuls 7,1% ont obtenu un poste d’assistant ou de professeur, et seuls 3,8% dirigent un groupe de jeunes chercheurs. 14,7% ont un poste de chercheur associé (un type de contrat limité dans le temps). La grande majorité (67%) travaille comme post-doctorants ou comme collaborateurs scientifiques, des postes qui sont en général moins payés que les postes équivalents en Allemagne.

 
– Revenus
Les résultats de l’étude contredisent la thèse qu’il est possible de mieux gagner sa vie aux Etats-Unis qu’en Allemagne, ce qui semble ne se vérifier que pour quelques exceptions. La part des chercheurs qui gagnent plus de 80.000 euros par an est de 16% pour les chercheurs qui sont revenus en Allemagne, de 15% pour ceux qui sont restés aux Etats-Unis. Pour les chercheurs qui gagnent entre 40.000 et 80.000 euros, elle est de respectivement 70% et 38%, et pour ceux qui gagnent moins de 40.000 euros, de 14% et 47%.

 
– Problèmes au retour
Il y a un gouffre entre la perception du retour en Allemagne et la réalité. 12% de ceux qui cherchent à rentrer pensent que les revenus en Allemagne constituent un défi, contre seulement 2% de ceux qui sont déjà rentrés. Un autre défi souvent mentionné est de trouver un poste en Allemagne en cherchant depuis l’étranger. Néanmoins, seuls 16% des chercheurs qui reviennent arrivent sans avoir déjà une offre d’emploi, et la moitié de ceux-ci trouvent un poste dans les trois mois.

 
– Evaluation de GAIN
94% des sondés étaient directement en contact avec GAIN pendant leur séjour en Amérique du Nord. 84% ont jugé leur participation à ses conférences annuelles très positivement ou plutôt positivement. Les autres services de GAIN, comme les newsletters, le site internet, les séminaires, les rencontres informelles, et les contributions aux frais de déplacement, ont également reçu un jugement positif.

 
– Souhaits vis-à-vis des décideurs politiques
Les jeunes chercheurs ont mentionné de multiples fois que de meilleures possibilités de planifier sa carrière scientifique grâce à une meilleure offre de postes sur le long terme, également dans des structures de taille moyenne, et plus de possibilités de transformer à l’issue du contrat un poste de professeur junior ou de dirigeant de groupe de jeunes chercheurs (postes à durée déterminée) en poste à durée indéterminée, permettrait d’augmenter encore plus l’attractivité de l’Allemagne en recherche et développement.

 

[1] La Fondation Alexander von Humboldt permet chaque année à plus de 2.000 chercheurs du monde entier de venir effectuer un séjour scientifique en Allemagne. La fondation dispose d’un réseau mondial présent dans 130 pays de plus de 25.000 « Humboldtiens » dans tous les domaines.

 

Pour en savoir plus, contacts :

Le site internet du GAIN est disponible à l’adresse suivante : http://www.gain-network.org

 

Sources :

– « Standort Deutschland ist attraktiv », communiqué de presse du BMBF – 05/11/2012 – http://www.bmbf.de/press/3364.php
– « Deutsche in den USA wollen zurück », article du Tagesspiegel – 06/11/2012
– « Rückflug über den Atlantik », article du Süddeutsche Zeitung – 06/11/2012
– « Nur jeder vierte deutsche Forscher bleibt in den USA », article du Handelsblatt – 06/11/2012
– « Deutschland wirbt in Boston für Rückkehr von Spitzenkräften », communiqué de presse de la DFG – 16/08/2012 – http://redirectix.bulletins-electroniques.com/HskjD
– « GAIN German Academic International Network », article de présentation de Kooperation International – 20/08/2012 – http://redirectix.bulletins-electroniques.com/4k8h6

 

Rédacteurs :

Elodie Parisot, elodie.parisot@diplomatie.gouv.fr – https://www.science-allemagne.fr