Lucratives inventions berlinoises…
Dans les établissements d’enseignement supérieur berlinois naissent en permanence de nouvelles inventions. Pour éviter que celles-ci ne restent empêtrées dans le marais universitaire, une agence s’occupe de les breveter et de les commercialiser. Ce qui peut rapporter gros : il y a peu, une invention de Dieter Bimberg, le Directeur du Centre de Nanophotonique à l’Université technique (TU) de Berlin, s’est vendue plus de 500.000 euros. Le procédé en question améliore l’efficacité de composants photoniques utilisés notamment dans les DEL. L’agence de commercialisation Ipal a réussi à vendre le procédé à une grande entreprise du secteur des semi-conducteurs.
L’Ipal s’occupe depuis dix ans des brevets et de la commercialisation pour la Charité (faculté de médecine berlinoise), les trois universités de Berlin, l’Ecole de sciences appliquées et d’économie de Berlin et l’Ecole Beuth de sciences appliquées. Il est rare d’entendre parler de ces commercialisations, d’une part parce que les inventeurs ne souhaitent pas susciter la jalousie de leurs collègues(30% nets du produit de la vente leur échoient), d’autre part parce que les entreprises ne souhaitent pas faire savoir quelles technologies elles achètent. Dans le cas de Dieter Bimberg, la publicité fait partie d’une campagne de sensibilisation auprès des inventeurs, explique Dirk Dantz, directeur de l’Ipal, selon qui la principale difficulté réside dans le fait que les inventeurs ne remarquent pas toujours qu’ils ont inventé quelque chose. Mais ils ne doivent pas tous s’attendre à obtenir des sommes aussi élevées que Dieter Bimberg : en 2010, l’ensemble des agences de valorisation des brevets de l’emsemble des Länder n’a récolté que 4,9 millions d’euros.
Les agences ont été créées après l’abolition en 2002 d’un privilège des professeurs qui leur donnait le droit de breveter directement leurs inventions. Ils doivent aujourd’hui passer par leurs établissements, ce qui doit faciliter le transfert des résultats académiques vers l’industrie. “Un tel transfert de connaissances hors de l’université n’est possible qu’avec des structures professionnelles”, affirme Dieter Bimberg. A Berlin, la ville participe au financement à travers la Banque d’investissement de Berlin.
Dans chaque université se trouvent des conseillers pour les inventeurs, qui travaillent en étroite coopération avec les agences de valorisation. Environ un tiers des inventions signalées mène à un brevet. L’agence ne vérifie pas uniquement que l’invention est brevetable, elle évalue également s’il pourrait y avoir des débouchés pour celle-ci. L’Ipal investit en effet en moyenne entre 40.000 et 50.000 euros dans un brevet, et doit veiller à recevoir des retours sur investissement. Les 23 employés vérifient, pour chaque domaine, que l’invention possède une chance sur son marché. La plupart sont experts en pharmacie, biotechniques, ou techniques médicales, les secteurs dans lesquels il existe aujourd’hui le plus d’inventions et qui fournissent à l’Ipal la moitié de son chiffre d’affaires.
A elles deux, la Charité et la TU déposent 80% des brevets sur la région de Berlin, grâce à leurs domaines de spécialisation. Mais d’autres facultés pourraient améliorer leur score si elles croyaient plus à leur force d’innovation, affirme Dirk Dantz, en particulier dans la psychologie, le design des produits, ou les logiciels. Depuis sa création, l’agence a déposé 489 brevets, et conclu 117 contrats d’utilisation. Cependant, le chemin de l’invention à l’utilisation est souvent long. Pour Dieter Bimberg, dont l’invention date de 2002, il aura fallu dix ans, un laps de temps normal, selon Dirk Dantz. C’est là l’une des difficultés principales de l’agence : “Nous devons juger,ce qui sera intéressant sur le marché dans dix ou quinze ans”, explique t-il. “Cela revient souvent à essayer de lire l’avenir dans le marc de café”.
Sources :
“Tüfteln mit Gewinn”, article du Tagesspiegel – 11/04/2012
Rédacteurs :
Elodie Parisot, elodie.parisot@diplomatie.gouv.fr – https://www.science-allemagne.fr