Lancement de Silicon Europe, premier réseau inter-clusters européen en micro-nanoélectronique

Les clusters DSP Valley (autour de Louvain, Belgique), Minalogic (Grenoble, France), Point One (Eindhoven, Pays-Bas) et Silicon Saxony (Dresde, Allemagne) ont lancé officiellement, lors de la conférence Semicon Europe organisée à la mi-octobre 2012, « Silicon Europe », le premier réseau inter-clusters en micro-nanoélectronique, fondé avec le soutien de la Commission européenne. L’objectif phare de Silicon Europe est de conserver et de consolider la position de l’Europe en tant que leader mondial de la microélectronique à haut rendement énergétique. Ce domaine, s’il est déjà le thème du cluster de pointe « Cool Silicon » labellisé au sein de Silicon Saxony par le gouvernement fédéral dès 2008 [1], correspond plus largement à un objectif de spécialisation dans les technologies dérivées à forte valeur ajoutée pour l’électronique, coïncidant avec les limites de la R&D en miniaturisation stricte des puces.

 
Plus précisément, le but du réseau européen est triple: il s’agit de promouvoir la micro-nanoélectronique européenne en tant que technologie « diffusante » (Key Enabling Technology, ou KET) apportant de nouvelles solutions pour répondre aux enjeux d’efficacité énergétique, de consolider les savoir-faire européens en matière de micro-nanoélectronique en s’appuyant sur les synergies qui existent entre les clusters, et enfin d’ouvrir l’Europe à de nouveaux marchés et de renforcer la compétitivité des PME en améliorant le transfert industriel et en développant une stratégie d’internationalisation.

 
Présente partout, la micro-nanoélectronique est en effet une technologie innovante et transversale qui est considérée comme essentielle au maintien de la compétitivité de l’Europe. Fort de ce constat, Silicon Europe a été créé pour mettre en commun les expertises en micro-nanoélectronique de chaque cluster qui le compose, selon un principe de « spécialisation intelligente », afin de former un réseau européen fort et compétitif pour conserver une place de leader à l’échelle mondiale. Ses atouts sont notamment une industrie forte, avec 135.000 employés qualifiés directs et 105.000 personnes employées par leurs fournisseurs locaux, en plus d’une R&D de renommée mondiale.

 
Tous issus d’une région spécialisée dans la micro-nanoélectronique et regroupant près de 800 instituts de recherche et entreprises [2] dont 75% de PME, les quatre clusters européens ont ainsi décidé d’unir leurs compétences pour permettre à tous leurs adhérents de créer un réseau d’échange de bonnes pratiques. Un plan d’action commun est sur le point d’être établi ; il favorisera les coopérations dans le domaine de la R&D, des relations d’affaires et des actions internationales. Silicon Europe compte ainsi insuffler une nouvelle dynamique à la politique industrielle européenne et entend se placer au coeur de la stratégie de croissance « Europe 2020 ».

 
Pour la Saxe, la spécialisation en microélectronique à haut rendement énergétique avait coïncidé temporellement avec la fermeture de Qimonda, branche nanoélectronique d’Infineon spécialisée sur les puces nanométriques (mémoires notamment). Le pôle saxon s’est engagé depuis dans une diversification sur les technologies dérivées, à l’exemple de l’électronique organique, qui présente un rendement énergétique ainsi qu’un coût industriel intéressant, avec un fort potentiel de marché. C’est également un secteur privilégié par Philips, un des leaders des technologies OLED, à Eindhoven, et également par le CEA Liten à Grenoble, spécialisé sur les nouvelles technologies dédiées à l’énergie. L’IMEC de Louvain reste quant à lui un centre de recherche d’excellence généraliste, ouvert aux collaborations internationales.

 
Dans une période où le standard technologique de la micro-nanoélectronique (puces sur substrat de 300mm) est maîtrisé, et la course à la miniaturisation stricte des transistors limitée (intensité capitalistique du futur standard 450 mm), les technologies dérivées interdisciplinaires, notamment à haut rendement énergétique, présentent un potentiel de valeur ajoutée encore supérieur, pour des coûts d’équipement équivalent. Cette piste prise par la R&D européenne peut lui permettre de tirer son épingle du jeu face aux lourds moyens engagés dans la nanoélectronique par les Etats-Unis (par exemple le pôle d’Albany, New-York) ou l’Asie (Taiwan, Corée du Sud, Chine), qui peuvent prétendre au passage au standard supérieur (estimé à huit milliards de dollars pour une usine unique), sans pour autant se focaliser sur des compétences interdisciplinaires.

 

[1] Les Spitzenclusters (clusters de pointe) sont une initiative issue de la Stratégie Hightech du gouvernement fédéral allemand. Cinq premiers lauréats ont été sélectionnés en 2008, cinq ont été ajoutés en 2010, et le troisième (et dernier) appel d’offre de l’initiative a nommé cinq autres pôles en janvier 2012. Au final, chaque cluster sélectionné reçoit 40 millions d’euros du gouvernement pour 5 ans, à condition que les partenaires économiques (entreprises, collectivité locales,…) apportent un montant équivalent.

[2] 75 à DSP Valley, 204 à Minalogic, 170 à Point-One, 297 à Silicon Saxony. On compte parmi les grands groupes Philips et sa branche semiconducteur NXP (à Eindhoven), Globalfoundries et Infineon à Dresde, STMicroelectronics, Schneider Electric, Thales pour Grenoble, et parmi les instituts de recherche l’IMEC (Louvain), les CEA Leti et Liten (Grenoble) et quatre instituts Fraunhofer dédiés à Dresde, en plus de la forte recherche universitaire dans ce domaine.

 

 

Pour en savoir plus, contacts :

« L’électronique organique en Allemagne : un domaine émergent et stratégique », rapport Ambassade de France à Berlin / ADIT, C. Collet – 17/10/2012 – http://www.bulletins-electroniques.com/rapports/smm12_028.htm

 

Sources :

– « SEMICON 2011 : bilan positif pour l’électronique organique et les collaborations franco-allemandes », BE Allemagne 544 – 20/10/2011 : http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/67971.htm
– « Lancement de Silicon Europe, réseau inter-clusters européen en micro-nanoélectronique : Leaders for Energy Efficient ICT Electronics », communiqué de presse du pôle Minalogic – 08/10/2012

 

Rédacteurs :

Charles Collet, charles.collet@diplomatie.gouv.fr – https://www.science-allemagne.fr