Premier auto-assemblage de structures nanométriques en deux étapes

 

Il existe deux approches principales pour construire des objets ou des systèmes nanométriques : la voie descendante (top-down) et la voie ascendante (bottom-up). La voie « top-down » consiste à pousser jusqu’à ses limites extrêmes la miniaturisation des éléments, issus de la transformation de matériaux en partant de l’échelle macroscopique. Inversement, l’approche « bottom-up » réside en l’assemblage de la matière atome par atome.

L’approche « bottom-up » permet de prendre en compte les phénomènes physiques, quantiques en particulier, qui apparaissent aux faibles dimensions. En outre, elle permet la fabrication d’éléments nanométriques fonctionnels à un coût plus réduit. A l’instar de la synthèse des protéines en biologie, issues de l’assemblage d’acides aminés guidé par l’information contenue dans l’ADN, les recherches en nano-construction s’orientent vers les techniques d’auto-assemblage des composants.

Des chercheurs de l’Institut Fritz Haber (FHI – Berlin) de la société Max Planck, en collaboration avec des chimistes de l’Université Humboldt de Berlin et des physiciens du laboratoire TASC de Trieste (Italie), sont parvenus à créer un réseau bidimensionnel de molécules de porphyrine sur une surface d’or, grâce à un processus d’auto-assemblage en deux étapes.

Sur une surface d’or complètement lisse, les chercheurs ont en effet attaché un atome de la famille des halogènes à chacune des quatre extrémités de plusieurs molécules de porphyrine. Il s’agit de deux atomes d’iode (I) et de deux atomes de brome (Br), deux éléments identiques étant placés l’un en face de l’autre de part et d’autre de chaque molécule. La surface d’or est alors chauffée à 120°C : l’iode possédant une liaison avec la porphyrine plus faible que le brome, les atomes d’iode se détachent des molécules de porphyrine en activant ces emplacements laissés libres. Les molécules s’assemblent alors entre elles au niveau de ces emplacements pour former des chaînes unidimensionnelles de molécules de porphyrine. Après cette première étape, la surface d’or est chauffée à 200°C. Les atomes de brome se détachent des chaînes de porphyrine en activant les emplacements laissés vides. Les chaînes de molécules de porphyrine s’assemblent entre elles au niveau des emplacements activés, en formant alors un réseau bidimensionnel. « A notre connaissance, c’est la première fois qu’un processus d’auto-assemblage en deux étapes sur des surfaces a été programmé », explique Leonhard Grill, directeur d’un groupe de travail à l’Institut Fritz Haber.

A l’aide d’un microscope à effet tunnel, les chercheurs ont observé que les réseaux bidimensionnels obtenus ne présentent que très peu de défauts. De plus, les réseaux sont plus grands que ceux issus d’un assemblage en une seule étape, c’est-à-dire en utilisant quatre atomes identiques issus de la famille des halogènes dans la préparation initiale.

Par un procédé similaire, les chercheurs sont parvenus à créer une structure hétérogène formée de fluorure de dibutylétain (D.B.T.F) et de porphyrine. Pour cela, ils ont ajouté des atomes de brome aux extrémités de la D.B.T.F et gardé la même structure que précédemment pour les atomes de porphyrine. Les chaînes unidimensionnelles de porphyrine se forment après la première activation. Suite à la seconde étape de chauffage, les chaînes de porphyrine et la D.B.T.F sont activées : les deux éléments s’assemblent. En utilisant des surfaces d’or présentant des rainures parallèles toutes les cinq rangées d’atomes, les chercheurs sont par ailleurs parvenus à modifier l’orientation des molécules de porphyrine, et ainsi à obtenir de nouvelles propriétés.

Ces techniques de contrôle de l’auto-assemblage de nanostructures possèdent de nombreuses applications en électronique moléculaire, notamment dans le contrôle des flux électron par électron, ou encore la spintronique.

 

Pour en savoir plus, contacts :

Dr. Leonhard Grill – Unité de chimie physique de l’Institut Fritz Haber de la société Max-Planck – tél. : +49 30 8413-5108 – email : lgr@fhi-berlin.mpg.de

 

Sources :

« Choreografie der Moleküle », communiqué de presse de la société Max-Planck – 19/01/2012 – http://www.mpg.de/4991406/Nanostrukturen_Selbstorganisation?page=1

 

Rédacteurs :

Lucas Ansart, lucas.ansart@diplomatie.gouv.fr – https://www.science-allemagne.fr