La lutte contre le commerce illicite de faune sauvage

Le braconnage d’espèces protégées, et le commerce illicite qui en découle, ont récemment atteint des niveaux sans précédent. Les causes sont multiples, mais la demande illicite de produits de luxe tels que l’ivoire d’éléphant ou la corne de rhinocéros, en particulier en Asie, reste une des motivations principales de ces crimes.

 

A titre d’exemple, il est à noter qu’en à peine 48 heures, un rhinocéros peut être tué et décorné dans un parc africain, puis sa corne revendue sous forme de poudre au Vietnam (d’après WWF). Victime d’un commerce plus organisé que jamais, cet animal a subi des pertes cinq fois plus importantes en 2013 qu’en 2007. Comme pour les éléphants, ce fort taux de mortalité « forcée » ne garantit pas un renouvellement des populations. Aujourd’hui, ce trafic serait le quatrième commerce illicite le plus rentable au monde, avec 19 milliards de dollars générés annuellement. Contrairement à d’autres crimes contre l’environnement, comme l’exploitation forestière illégale ou encore l’immersion des déchets, les crimes perpétués à l’encontre de la faune restent souvent impunis.

 


Corne de rhinocéros saisie – L’accouplement des rhinocéros peut durer plus d’une demi-heure, c’est sans doute pourquoi certains attribuent, sans fondements, des effets thérapeutiques et aphrodisiaques à la corne de rhinocéros broyée. Celle-ci n’est pourtant constituée principalement que de kératine, une substance banale retrouvée dans les ongles, les cheveux et les sabots. En Chine, le kilogramme de poudre de corne de rhinocéros se vend 50.000 dollars.
Crédits : Stahlkocher


Le 22 janvier 2014 s’est tenue une rencontre sur le thème de la criminalité envers la faune sauvage, organisée par l’Ambassade du Royaume-Uni à Berlin, en coopération avec WWF Allemagne et l’Institut Ecologic. L’atelier a permis à des experts originaires d’Allemagne et de Grande-Bretagne de partager leurs expériences acquises dans la lutte contre cette criminalité spécifique. Les échanges ont principalement porté sur les « cinq grands »: éléphant, rhinocéros, buffle, lion et léopard.

 

Le programme EFFACE, une initiative de l’Union européenne pour combattre les crimes environnementaux, a ainsi a été présenté [1]. De plus, des pistes menant à diverses solutions ont été mentionnées. En voici quelques exemples :
– Améliorer les moyens et la formation des employés qui veillent sur ces animaux
– Prolonger les efforts de démystification autour des produits (os de tigre, etc.)
– Décorner, si nécessaire, les animaux en prévention afin qu’ils n’aient plus d’intérêt d’être tués
– Continuer les efforts de conservation des habitats
– Développer certains aspects du tourisme afin que les « animaux vivants aient plus de valeur que les animaux morts »
– Améliorer la communication entre les services de police et les douanes
– Appliquer les lois actuelles, notamment en luttant contre la corruption
– Communiquer les risques de sentences encourues par les personnes impliquées dans ce trafic
– Développer une lutte globale face au crime organisé à l’échelle internationale

 

Une des solutions les plus efficaces consiste à intégrer les populations locales à l’effort de conservation. La situation économique locale permet de diminuer le nombre de braconniers de « fortune », car les crimes sur la faune sauvage sont principalement commis par des populations pauvres et sans ressources alternatives. « Saving animals is empowering people » a ainsi rappelé Robert Zohlo du WWF.

 

Suite à une question sur les éventuels leviers économiques envisageables, une réflexion a été menée, en aparté, sur les bénéfices que pourrait engendrer une « légalisation » du commerce de l’ivoire. Cette idée corrobore la théorie selon laquelle une « libération » des stocks d’ivoire ferait chuter le prix du produit et donc diminuer l’intérêt d’aller tuer ces animaux. Toutefois, cette solution semble avoir plus d’inconvénients que d’avantages. En effet, il sera difficile de différencier l’ivoire d’origine légale de celui d’origine illégale. Cette solution pourrait aussi mener paradoxalement à l’effet inverse, c’est-à-dire une augmentation de la demande car les consommateurs ne seront plus sujets à des sentences. Enfin, dans le même ordre d’idée, une action ayant pour objectif d’inonder le marché avec des produits factices est en cours de réflexion.

 

L’Allemagne semble s’investir dans la lutte contre le braconnage et le trafic car la population allemande est sensible aux crimes environnementaux perpétués sur la faune sauvage. Aussi, le gouvernement souhaite contribuer à l’effort global de préservation de la biodiversité.

 

Les 12 et 13 février une nouvelle conférence, à Londres, sera dédiée à la thématique avec la présence des ministres de plus de 50 pays [2].

 

Pour en savoir plus, contacts :

– Liste des intervenants du panel :
* Dr. R. Andreas Kraemer, directeur de l’institut Ecologic
* Christiane Gerstetter, Cheffe du projet EFFACE
* Eberhard Brandes, CEO WWF Allemagne
* DR. Rolf Peter Mack, Agence Allemande de coopération Internationale (GIZ)
* Roberto Zohlo, WWF Afrique de l’Est
* Dr Jennifer Maher, Université de Galles du Sud
* Simon Gallagher, Ambassade du Royaume-Uni
– [1] Plus d’information sur le programme européen EFFACE (en anglais) – http://efface.eu/research
– [2] Plus d’information sur la conférence de Londres en février 2014 (en anglais) – http://redirectix.bulletins-electroniques.com/gD8KJ
– Réseau de surveillance du trafic illégal de la faune et de la flore (en anglais) – http://www.traffic.org/

 

Sources :

Participation du rédacteur à la conférence « Combating Wildlife Crime – Efforts and Perspectives from the UK and Germany » – Ambassade du Royaume-Uni à Berlin – 22/01/2014

 

Rédacteurs :

Clément Guyot, clement.guyot@diplomatie.gouv.fr – https://www.science-allemagne.fr