Congrès annuel de la photonique en Allemagne

La photonique est une technologie-clé en Allemagne qui englobe de nombreuses applications. Les technologies de la communication, la santé, la sécurité sont autant de domaines concernés par les recherches dans les technologies laser ou LED pour ne citer qu’elles. Le 20 février a eu lieu, à Berlin, le congrès annuel de la photonique, en présence de la ministre de l’éducation et de la recherche Mme Wanka. L’accent de la conférence a porté sur une comparaison entre l’Europe et l’Asie en tant que lieu de recherche, de production et de marché visé. Un nouveau rapport sur l’industrie de la photonique a également été présenté, estimant un marché mondial d’environ 615 milliards d’euros d’ici 2020, soit quasiment le double de 2011. La branche s’est organisée en Allemagne pour défendre sa place et pour coordonner ses efforts dans ce domaine.

 

Le congrès de la photonique 2014 a été organisé par le Ministère de l’enseignement et de la recherche (BMBF), le Ministère fédéral de l’économie et de l’énergie (BMWi) et les associations de l’industrie SPECTARIS, VDMA et ZVEI. Il s’est déroulé sur une journée, avec une séance plénière présentant les grandes tendances de la branche et des forums mettant en lumière des entreprises ou associations travaillant sur le sujet.

 

Une thématique suivie de près au niveau gouvernemental

Mme Johanna Wanka a évoqué la photonique comme étant l’une des clés pour la compétitivité et l’innovation. Le Prix allemand de l’avenir 2013 a, en effet, été remis à une équipe travaillant dans le domaine des lasers. Les deux autres nominées travaillaient également dans cette branche.

Elle a souligné le rôle de l’innovation et l’importance qu’elle joue dans les objectifs du nouveau gouvernement, en favorisant notamment la recherche extra-universitaire. Elle s’est félicitée des changements déjà apportés au paysage allemand et souhaite une continuité dans le soutien apporté à la recherche. La « High Tech Strategie » doit continuer à être développée pour relever les défis tels :
– Continuer la numérisation des entreprises et des lieux de production, l’année de la science 2014 s’inscrivant d’ailleurs dans ce cadre : « la société numérique » ;
– Soutenir l’excellence et les projets innovants sur le long terme ;
– Améliorer le transfert, par de nouvelles méthodes de travail entre les mondes scientifique et économique. A partir de travaux de recherche aboutis, la mise au point de produits commercialisables serait un point à améliorer d’après la ministre, par exemple par la mise en place d’incubateurs ;
– Intensifier le dialogue avec la société civile.

Mme Wanka a insisté sur l’importance d’attirer et de garder les meilleures équipes scientifiques sur le territoire allemand.

Brigitte Zypries, Secrétaire d’Etat au Ministère de l’économie et de l’énergie (BMWi) a rappelé la bonne place de l’Allemagne dans le marché de la photonique et les efforts à mettre en oeuvre pour ne pas se laisser distancer ou rattraper dans l’environnement ultra-compétitif de la branche. Elle a également fortement encouragé les scientifiques et les entrepreneurs présents à faire appel aux services du gouvernement fédéral et à ses nombreux programmes de financement, tel que le Programme central d’innovation pour les PME (ZIM).

Peter Leibinger, vice-président en charge de la division laser TRUMPF, s’est félicité de la décision du gouvernement fédéral d’engager une action en 2012 dans le sens de la photonique : « Recherche photonique en Allemagne ».

Henning Kagermann, président de l’Académie des sciences Acatech, a focalisé son discours sur l’organisation de la recherche. D’après lui, l’innovation passera de plus en plus par de nouveaux modèles de coopération ; des réseaux de coopération bien organisés devraient se montrer efficaces en ce sens.

 

Les secteurs clés d’un marché porteur

Le congrès a été l’occasion de présenter la dernière édition du rapport sur l’industrie de la photonique. L’Allemagne est bien placée dans quatre domaines, où elle occupe environ 17% du marché mondial : les techniques de production, les sciences médicales, les techniques de mesure et les composants optiques. Les prévisions pour 2020 tendent à la stabilisation, voire à la croissance de la part de marché du pays sur ces domaines. L’Allemagne est par contre en retard dans le photovoltaïque, la photonique appliquée aux TIC et le marché de l’éclairage.

En termes de marché, la photonique représentait un volume national de 28 milliards d’euros en 2012, avec une croissance de 8% comparée à l’année précédente. L’étude prévoit un marché de 44 milliards d’euros en 2020. Le taux d’exportation s’élève à 26%. Au niveau mondial, le marché de la photonique passerait de 350 milliards d’euros en 2011 à 615 milliards d’euros en 2020.

 

Forces et faiblesses de l’Allemagne et de l’Europe

M. Leibinger a également comparé l’Allemagne à l’Asie, en termes de lieu de recherche et de marché. L’Allemagne se caractérise par un réseau important de PME qui sont spécialisées dans la production de petites séries, représentant en cumulé un investissement massif dans la R&D. La dynamique de la branche, sa structure bien établie, ainsi que la culture du changement ont également permis de générer ce succès allemand. L’industriel a en outre souligné l’a priori positif dont jouit la photonique ainsi que son représentant le plus connu, le laser, auprès du grand public. M. Leibinger s’est dit très confiant dans le futur de la branche et dans sa capacité à surmonter les défis se présentant dans les années à venir.

Michael Mertin, président de la plateforme européenne de technologie Photonics21, a établi un état de lieu des forces et faiblesses de l’Europe et de l’Asie. D’après lui, les forces de l’Europe tournent autour :
– de formations de qualité ;
– de connaissances étendues ;
– d’une infrastructure de recherche et de financements bien établis ;
– d’une relation étroite entre l’industrie et la recherche ;
– d’un haut niveau de sécurité juridique.

 

L’Europe produit des équipements et des biens de consommation de qualité, couvrant des marchés spécifiques ou des niches portant sur un nombre limité de pièces, avec une production flexible. La Chine offre, quant à elle, une main d’oeuvre peu onéreuse, une mentalité de « start-up » (enclin à la prise de risque et pragmatique) et un processus de décision, puis de mise en oeuvre rapide. Le focus est porté sur des marchés de masse dans un contexte de production normalisée.

 

Le programme européen « Horizon 2020 » prévoit d’encourager les partenariats public-privés, ce qui semble particulièrement adapté au cas de la photonique dans les pays les plus avancés en la matière : l’Allemagne, la France et l’Italie. D’après le représentant de Photonics21, les défis pour l’Europe sont liés à une augmentation de la régulation, la hausse des coûts (taxes, charges et prix de l’énergie) et le rejet de certaines technologies par le public.

 

La photonique, une technologie pour l’avenir

Quelques exemples de technologies ont été présentés. Bernd Buxbaum, président de PMDTechnologies, a présenté une caméra 3D qu’il revendique être la plus petite du monde. Il a expliqué sa vision de l’innovation basée sur une approche centrée sur l’utilisateur final.

Nikolai Zaepernick, d’EOS, a lui expliqué pourquoi le frittage sélectif par laser (laser sintering), méthode d’impression 3D, était une technologie d’avenir. Cette technologie présente des avantages de liberté de conception, de coûts, de personnalisation ainsi que de rapidité.

Sandro Gaycken, expert en sécurité informatique de l’Université libre de Berlin, a défendu une thèse assez provocatrice, expliquant que la sécurité des solutions logicielles existantes est plus que défaillante et que l’engouement pour le cloud computing n’allait pas permettre d’améliorer la situation. Il insiste sur le besoin d’être prudent et de ne pas se laisser attirer par toutes les nouvelles technologies ou innovations.

Andreas Tünnermann, directeur pour l’Institut Fraunhofer pour l’optique appliquée et la mécanique de précision (IOF) d’Iéna (Thuringe) a exposé les résultats de son institut dans le développement de caméras à facettes, basées sur le mécanisme des yeux de mouches.

 

Initiative « Make Light »

Dans le cadre du congrès, était organisée l’exposition de l’initiative « Make Light ». Cette initiative du Ministère fédéral de l’éducation et de la recherche (BMBF) a pour objectif de simplifier la mise en place de solutions créatives dans le domaine de la photonique. Des « fab lab » (lieu ouvert au public où sont mis à disposition toutes sortes d’outils, notamment des machines-outils pilotées par ordinateur, pour la conception et la réalisation d’objets) et des start-ups d’origine allemande ont présenté leurs projets respectifs, principalement autour des scanners et imprimantes 3D.

 

Pour en savoir plus, contacts :

Rapport sur l’industrie de la photonique, état des lieux (février 2014), en allemand : http://redirectix.bulletins-electroniques.com/81MqT

 

Sources :

Participation des rédacteurs au congrès, le 20 février 2014 à Berlin

 

Rédacteurs :

Grégory Arzatian, gregory.arzatian@diplomatie.gouv.fr, Aurélien Filiali, aurelien.filiali@diplomatie.gouv.fr – https://www.science-allemagne.fr/