Nouvelles solutions de conception et de réparation dans l’aéronautique

Dans le cadre du salon du Bourget du 17 au 23 juin 2013, la Société Fraunhofer dévoilera deux nouveautés dans le domaine de l’aéronautique. D’une part, l’Institut Fraunhofer de physique du bâtiment (IBP, Stuttgart, Bade-Wurtemberg) a développé un nouveau logiciel permettant d’évaluer très en amont le bilan écologique des pièces, ce qui permet une construction plus écologique et plus durable. D’autre part, l’Institut Fraunhofer pour le développement d’unités de production et de techniques de construction (IPK, Berlin) a développé une solution plus performante pour la réparation des pales des turboréacteurs.

 

 

Construire des avions plus durables

Pour pouvoir construire des avions d’une manière plus durable, il faudrait pouvoir disposer du bilan écologique des composants, et ce, au début de la conception de l’appareil. C’est ce que propose un nouveau logiciel mis au point par les scientifiques de l’IBP.

 

L’industrie aéronautique s’est donnée des objectifs ambitieux pour 2020, à savoir une réduction des émissions de dioxyde de carbone de 50% et des oxydes d’azote de 80%. Pour cela, un enregistrement systématique de toutes les données concernant l’empreinte écologique des pièces mécaniques est nécessaire, et ce pour leur cycle de vie complet, de la fabrication au recyclage. Cette pratique est appelée « évaluation du cycle de vie » (LCA selon l’acronyme anglais) par les experts.

 

Cependant il existe deux inconvénients. Tout d’abord, le travail est externalisé à des entreprises possédant les connaissances en LCA. Ensuite, les données sont le plus souvent recueillies rétrospectivement, car les projets aéronautiques s’étalent sur 20 ans et la conception « écologique » n’était pas encore prévue à l’époque.

 

Les scientifiques de l’IBP, en coopération avec le département « technologies de l’ingénierie collaborative » (IET) de l’Institut Fraunhofer pour l’infographie (IGD, Darmstadt, Hesse), du département « cycle de vie » (GaBi) de l’IBP basé à l’Université de Stuttgart ainsi que des industriels du secteur tels qu’EADS, ont donc développé des outils logiciels « Eco-design », dans le cadre de l’opération « Clean Sky », un des plus gros projets de la Commission européenne, doté de presque 1,6 milliard d’euros. Cette boite à outils de logiciels est localisée sur une base de données aéronautiques concernant les pièces et techniques existantes. Cela permet donc une évaluation a priori des effets d’une pièce sur l’environnement. Robert Ilg, chercheur à l’IBP au sein du département GaBi, explique que chaque pièce est dotée « d’un sac à dos environnemental » qui quantifie toute son empreinte.

 

Par exemple si l’on imagine une pièce composée d’un kilo d’aluminium, son « sac à dos environnemental » comprendra tout depuis l’extraction du minerai de bauxite jusqu’à son transport et son post-traitement en Europe. De plus, l’empreinte écologique dépend du mode de traitement du matériau, et l’industrie aéronautique repose sur nombre de processus complexes, gourmands en énergie et surtout en constante évolution. Robert Ilg explique que c’est cet aspect orienté sur les particularités de l’industrie qui « faisait défaut jusqu’à présent. »

 

Un autre avantage de ce pack de logiciels est qu’il permet au concepteur de voir en temps réel l’impact écologique de sa pièce. De plus, il peut faire varier les scénarios et comprendre très rapidement les effets d’un matériau ou d’une surface. L’intérêt est d’amener dans le bureau d’étude une compétence qui était auparavant sous-traitée.

 

 

Des robots et des hommes

Le secteur des turbomachines est en pleine croissance en Allemagne. Au cours des 25 dernières années, la part de marché de cette industrie sur le marché mondial est passée de 15 à 30%. Le service au client y est essentiel. Ce service est généralement assuré par le département « maintenance, réparation et remplacement », MRO selon l’acronyme anglais. La plupart des demandes viennent de problèmes sur les pales des compresseurs ou des turbines. En effet, ces pièces mécaniques sont les plus sollicitées car elles doivent transformer l’énergie cinétique du fluide en énergie mécanique. A cela s’ajoute les vibrations ou les frottements dus à la poussière ou au sable.

 

Comment gérer une pale abîmée? Il existe deux stratégies : soit réparer, soit remplacer la pièce. Le coût de ces pales est cependant relativement élevé (de l’ordre du millier d’euros, sachant qu’on doit souvent en remplacer plusieurs d’un coup), du fait des matériaux ainsi que des techniques de fabrication de pointe ; il faut en outre faire certifier le changement, un processus long et complexe qui demande l’implication de plusieurs ingénieurs. C’est pourquoi la solution privilégiée reste la réparation. Or pour l’instant, la seule technique reposait sur l’expertise des opérateurs, aidés par leurs outils. Désormais les chercheurs de l’IPK, en coopération avec des spécialistes du secteur des turbomachines tels que Rolls-Royce, Siemens, MTU ou encore MAN, ont développé des robots capables de nettoyer la pale, de reconnaître le problème et d’y remédier.

 

 
Martin Bilz est convaincu de l’importance de ce procédé pour l’industrie : « Ces robots représentent non seulement un bon exemple pour des processus MRO efficaces énergétiquement et peu gourmands en ressources, mais aussi un coup de pouce pour de nouvelles méthodes de fabrication. Cette technologie rend la réparation plus efficace, plus rapide et moins chère. Nous voulons voir maintenant si nous pouvons l’importer sur la chaîne de fabrication ». Les scientifiques de l’IPK seront présents pour présenter leur procédé au salon du Bourget.

 

Il est à noter que la Société Fraunhofer a lancé fin mai 2013 le cluster d’innovation « Ingénierie du cycle de vie des turbomachines » cluster qui implique l’IPK, l’institut Fraunhofer pour la fiabilité et la micro-intégration (IZM, basé à Berlin, en Saxe et en Bavière), l’Institut Heinrich Hertz pour les techniques d’information (HHI, Berlin) ainsi que l’Institut Fraunhofer des technologies et systèmes céramiques (IKTS, Dresde, Saxe), dont l’objectif est résumé ainsi par Martin Bilz : « Notre but est de développer des technologies efficaces énergétiquement et peu gourmandes en ressources pour les cycles de vie des turbomachines. Nous nous intéressons à toutes les étapes de la vie de ces machines, du design à la maintenance. »

 

 

 

 

Pour en savoir plus, contacts :

– Le projet « Clear Sky » dispose de son site internet (en anglais) : http://www.cleansky.eu/
– Martin Bilz, Institut Fraunhofer pour le développement d’unités de production et de techniques de construction (IPK) – tél. : + 49 30 39006 147 – email : martin.bilz@ipk.fraunhofer.de
– Dipl.-Ing. Robert Ilg, Institut Fraunhofer de physique du bâtiment (IBP) – tél. : + 49 711 970 3162 – email : robert.ilg@ibp.fraunhofer.de

 

Sources :

– « Turbinen robotergestützt reparieren », communiqué de presse de la Société Fraunhofer – 03/06/2013 – http://redirectix.bulletins-electroniques.com/ZNjG1
– « Flugzeuge nachhaltiger bauen », communiqué de presse de la Société Fraunhofer – 03/06/2013 – http://redirectix.bulletins-electroniques.com/u0IPX

 

Rédacteurs :

Grégory Arzatian, gregory.arzatian@diplomatie.gouv.fr – https://www.science-allemagne.fr