Le développement des énergies renouvelables ne se fera pas sans adaptation du réseau électrique

L’Agence allemande pour l’énergie (Dena) vient de rendre publique une étude (Netzstudie II, [1]) visant à qualifier les besoins d’évolution du système électrique en Allemagne d’ici à 2020/2025. Il s’agit notamment d’étudier comment le système doit être optimisé et amélioré afin de répondre aux nouveaux défis posés par l’intégration massive d’énergies renouvelables (EnR), tout en maintenant sa fiabilité et en garantissant un coût abordable. L’étude a été commandée par les ministères fédéraux de l’environnement (BMU) et de l’économie (BMWi), qui ont participé à son financement avec des entreprises et associations énergétiques, constructeurs de réseau électrique, industriels et énergéticiens.

 

L’étude a été élaborée par un consortium sous la direction de l’Institut de l’économie de l’énergie (EWI) de l’Université de Cologne (Rhénanie du Nord-Westphalie). Deux experts externes ont examiné les résultats de l’étude : le professeur Ulrich Wagner de l’Université technique de Munich (TUM) et le professeur Armin Schnettler de l’Université technique de Rhénanie du Nord-Westphalie (RWTH) d’Aix-la-Chapelle.

 

Trois objectifs principaux se présentaient aux rédacteurs : l’intégration de 39% de production d’électricité à partir des EnR (en particulier éolienne), un optimum économique dans l’utilisation des centrales conventionnelles et la prise en compte de la croissance du marché électrique européen, donc des échanges. Comme le signale Stephan Kohler, le président de la Dena, « le développement des EnR place le système énergétique devant de grands défis. Nous devons apporter l’électricité éolienne de la mer Baltique et de la mer du Nord aux consommateurs au sud. Par ailleurs, les centrales conventionnelles doivent être modernisées et exploitées de telle sorte qu’elles puissent être complémentaires des EnR tout en conservant une efficacité économique ».

 

Dans un scénario de base, la Dena indique qu’il serait nécessaire d’édifier quelque 3.600 km de nouvelles lignes de 380 kV d’ici à 2020 afin d’absorber la montée en force de l’éolien : une capacité éolienne évaluée à 37 GW en terrestre à l’horizon 2020, auxquels il faut ajouter 14 GW offshore [2], quand la capacité en photovoltaïque pourrait atteindre 18 GW. Ces lignes viendraient s’ajouter aux 850 km déjà jugés nécessaires dans une précédente étude d’ici à 2015, afin de sécuriser le système. La Dena signale que seuls 90 km sur ces 850 km ont déjà été construits. Au total, l’investissement requis pour les 3.600 km supplémentaires s’élève à 9,7 milliards d’euros, raccordement de l’offshore éolien inclus.

 

La Dena a aussi analysé la contribution de technologies innovantes au renforcement du réseau :
– suivi des lignes aériennes : cela permettrait de surveiller la température de fonctionnement des lignes, pour une meilleure conduction électrique en cas de mauvais temps. Mais les intempéries étant limitées dans le temps, ce procédé permettrait seulement de réduire la longueur des nouvelles lignes à 3.500 km (au lieu des 3.600 à l’origine), et il nécessiterait d’adapter 3.100 km supplémentaires des lignes aériennes existantes à haute tension, pour un coût de 9,8 milliards d’euros.
– mise en place de câbles de conducteurs à haute température : cette technique pourrait réduire l’édification de nouvelles lignes à 1.700 km. Cependant, 5.700 km de lignes existantes devraient être également aménagées, et les coûts atteindraient quasiment 17 milliards d’euros.
– utilisation de lignes à haute tension souterraines à courant continu, pour améliorer l’acceptation de la population. Si ce choix réduit la longueur utile à 3.400 km, il est franchement plus coûteux : entre 22 et 29 milliards d’euros.

 

Par ailleurs, d’autres mesures ont été considérées, comme l’augmentation des capacités de conduction grâce à la surveillance de la température, la gestion de la demande électrique et la mise en place de réservoirs électriques, en particulier sous forme de centrales de pompage-turbinage [3], de réservoirs à air comprimé [4] ou à hydrogène.

L’étude a été élaborée selon le scénario de sortie du nucléaire encore valable en 2008, et seul le consortium d’experts a considéré la prolongation des réacteurs nucléaires décidée par le Bundestag en octobre 2010 (concept énergétique [5]). Les rapporteurs précisent que la prolongation des réacteurs nucléaires allemands ne change pas les besoins en matière de réseaux.

 

La réalisation des mesures d’infrastructures de réseau allemand devrait durer environ 10 ans, provoquant ainsi un déséquilibre entre les capacités en EnR et l’infrastructure du réseau nécessaire. Ainsi, les scénarios présentés dans l’étude de la Dena doivent être complétés par un catalogue de mesures permettant une réalisation rapide. La Netzstudie II donne les recommandations suivantes :
– contrôle fondamental et planification de mesures de développement de réseau concrètes ;
– accélération des processus d’homologation et amélioration du cadre législatif ;
– mesures pour augmenter l’acceptation du développement du réseau par la population ;
– vérification de technologies de transport d’électricité alternatives dans le cadre de planifications futures de réseau ;
– réalisation de projets pilotes pour mettre en place les technologies choisies.

 

Pour en savoir plus, contacts :

– [1] Rapport de la Dena (en allemand) : http://redirectix.bulletins-electroniques.com/IVcWf – Résumé des résultats de l’étude (en allemand) : http://redirectix.bulletins-electroniques.com/86GNe
– [2] Informations supplémentaires sur l’éolien offshore en Allemagne : « Alpha Ventus : coup d’envoi pour la recherche en énergie éolienne offshore » – BE Allemagne 482 – 05/05/2010 – http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/63250.htm
– [3] Informations sur le stockage par pompage-turbinage : « Stockage d’énergie : des centrales de pompage-turbinage souterraines » – BE Allemagne 506 – 24/11/2010 – http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/65196.htm
– [4] Informations sur le stockage par air comprimé : « Une nouvelle méthode de stockage d’électricité excédentaire sous forme de gaz naturel » – BE Allemagne 482 – 12/05/2010 – http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/63333.htm + liens en bas de l’article vers d’autres BE
– [5] « Concept énergétique du Gouvernement fédéral pour un approvisionnement énergétique durable, fiable et abordable financièrement » – BE Allemagne 500 – 18/10/2010 – http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/64805.htm

Source :

– Communiqué de la Dena – 23/11/2010 – http://redirectix.bulletins-electroniques.com/MjdE8
– « Brüderle: « Die Herausforderungen beim Ausbau der Erneuerbaren liegen bei den Netzen! », Communiqué du BMWI – 23/11/2010 – http://redirectix.bulletins-electroniques.com/usXdc
– Dépêche idw, communiqué du VDE – 26/11/2010 – http://idw-online.de/pages/de/news399054

Rédacteur :

Claire Vaille, claire.vaille@diplomatie.gouv.frhttps://www.science-allemagne.fr