Climatalk 2020 avec Sabrina Speich « L’océan : le véritable cœur battant de notre climat »

L’océan se réchauffe car il absorbe plus de 90 % de l’excès de chaleur et un quart du CO2 accumulé dans le système climatique. Or, au contraire de l’atmosphère, l’océan est un milieu opaque, les observations satellitaires ne percent pas sa surface. Notre connaissance vient de mesures effectuées directement dans son intérieur. Le challenge est immense : l’océan est vaste, la pression qui s’exerce sur les instruments est immense, les conditions météorologiques difficiles. De plus, la durée et les coûts des campagnes en mer intimident les gouvernements et bien les modèles numériques nous aident à comprendre les phénomènes climatiques, ils demeurent encore approximatifs par rapport à la complexité du système.

Or, si la base de la décarbonisation repose sur des principes physiques simples et sans équivoque, nous sommes aujourd’hui dans l’urgence de développer une stratégie efficace pour adapter notre environnement au changement climatique. Cela nécessite la prise en compte de la composante océanique dans les modèles de prévision du temps à plus longue échéance afin de prévoir de façon plus précise l’évolution de cyclones tropicaux, des tempêtes, des sécheresses, de l’augmentation du niveau de la mer et aussi d´administrer la pêche (ou l’aquaculture et les énergies marines). Cela implique non seulement des modèles numériques plus fidèles, une compréhension de processus plus fine mais aussi la mise en place d’un réseau d’observations intégré et pérenne de l’océan comme ce qui a été fait pour l’atmosphère afin d’alimenter en données les prévisions météorologiques.

Ces derniers 20 ans la science océanographique a fait des pas de géant. Néanmoins nous devons faire face encore à des nombreux défis. Dans cet entretien je donnerai un bref aperçu de notre approche du grand bleu et de comment notre communauté très éparpillée s’est unie dans l’effort commun d’aider la société non seulement à diminuer son empreinte sur le système climatique mais à faire face aux évolutions du temps.

Sabrina Speich
Professeure d’océanographie physique et sciences du climat à l’École normale supérieure
Laboratoire de Météorologie Dynamique – Institut Pierre-Simon Laplace